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17 avril :

L’Homme du XVIIe siècle

« Cet homme de 1600 dont les armures nous laissent rêveurs avait de quoi nous déconcerter bien davantage par sa petite taille, sa précocité, sa résistance physique et nerveuse, son amour des combats, son prodigieux appétit, ses convictions inébranlables. Si nous le suivons de sa naissance à sa mort, souvent prématurée, il ne nous marchandera pas les surprises », a écrit avec justesse Philippe Erlanger.

Clio et moi avons joué à ce petit jeu :

Imaginez.

Vous êtes né en 1600. Vos parents vous ont conçu l’année précédente, en se connaissant à peine (surtout s’ils font partie de la bonne société).

  • Certes, disait Mme de Chantal à sa fille, je suis bien contente d’avoir fait ce mariage sans vous ; c’est ainsi que se gouvernent les sages et je veux, ma chère fille, être toujours votre conseil.

Les paysannes étaient plus livres que les jeunes filles des villes. Elles pouvaient décourager leur soupirant en glissant dans sa poche quelques grains d’avoine… d’où l’expression alors fort usitée : « Il a reçu l’avoine ». Si le jeune homme au contraire lui plaisait, la fille n’avait qu’à saupoudrer abondamment un bouilli de fromage râpé. C’était là une véritable déclaration d’amour et la demande pouvait alors être adressée par des parents ou des amis haut placés.

Une fois venu le mariage, il était bon qu’au seuil de la maison conjugale, la jeune femme brisât un œuf à coups de pied et reçût du blé au visage (en Angleterre ne jette-t-on pas aujourd’hui encore du riz ?) Des hommes pieux passaient la première nuit en prière auprès de leur femme. C’était la « nuit de Tobie ». Certains prolongeaient cette abstinence trois jours durant. « Mais d’habitude l’impatience faisait tort à la religion. »

Dès votre naissante, on vous donnait une nourrice « bien carrée de poitrine », bien brune de peau cas son lait était réputé meilleur, et assez chaste pour ne pas désirer la présence de son mari. C’est alors que commençaient vos ennuis et il fallait véritablement que vous soyez doué d’une résistance de fer pour survivre aux remèdes et superstitions que Philippe Erlanger a recensés pour notre joie.

Vos dents mettaient-elles quelques réticences pour apparaître ? La dent de vipère suspendue à votre cou n’avait pas fait son office ? Votre nourrice vous frottait alors les gencives avec un doigt enduit de miel, de beurre, de lait de chienne mêlé à de la cervelle de porc, de lièvre et de vipère. Contre l’incontinence d’urine, on vous servait (bien avant le sevrage) un rôti de porc-épic ! Quant au sevrage, il était assez inattendu. Le futur Louis XIII mangea pour son premier plat (à dix-huit mois) un hachis de canard gras à souhait.

A sept ans, tandis que les filles prenaient le chemin du couvent, les garçons entraient au collège. Les parents estiment aujourd’hui que les programmes sont surchargés. Qu’auraient-ils dit sous Henri IV ! Leur fils se serait levé à 4 heures pour travailler jusqu’à 8 heures du soir. Les élèves des petites classes mangeaient chaque jour un hareng ou un œuf, les aînés un tiers d’une pinte de vin, le trentième d’une livre de beurre, un plat de légumes sans viande et l’inévitable hareng.

Bien sûr, on ne se lavait qu’en cas de maladie. A l’aube du XVIIe siècle, les courtisanes seules (et quelques excentriques) se baignaient autre chose que la figure ou les mains.

Le mouchoir était on ne peut plus discuté. Montaigne nous raconte qu’un gentilhomme français, « qui se mouchait toujours de sa main », l’interpella en lui demandant « quel privilège avait ce sale excrément que nous allassions lui apprêtant un beau linge délicat à le recevoir et puis, qui plus est, à l’empaqueter et serrer soigneusement sur nous… » « Je trouvai, conclut Montaigne, qu’il ne parlait pas sans raison. »

On soignait par contre fort bien la présentation des chaises percées, ornées, bordées de riches étoffes et revêtues de velours aux armes de leur propriétaire. Mme d’Albret préférait le drap vert, le duc d Guise le satin cramoisi et Mme de Montylat, gouvernante du Dauphin, la serge rouge. Si vous étiez prince, vous auriez pu la couronner d’un dais…

En arrivant à table, vous trouviez tous les mets qui vous attendaient placés sur des plats couverts (non pour les tenir au chaud, précise l’auteur, mais à cause de la vieille crainte du poison). De là l’expression « mettre le couvert ». On s’asseyait nouant les deux bouts de sa serviette derrière son col, opération si malaisée qu’elle donnera naissance à l’expression prononcée assurément bien souvent par les Français de tous les temps :

  • Qu’il est difficile de joindre les deux bouts !

Point de fourchette, trois ou quatre couteaux par table, mais une cuillère pour chacun. Au fond d’un verre, on déposait une croûte de pain grillé (une tostée). Le verre devait passer de main en main et arrivait devant le convive que l’on voulait honorer et qui avait le droit de manger la tostée. On le voit, porter un toast ne vient pas plus d’Angleterre que le mot flirt, dérivé de notre vieux conter fleurette…

On ne vivait pas très vieux. Les médecins étaient là pour y veiller… On saignait à faire mourir le patient. Quant aux remèdes donnés sous Henri IV et Louis XIII, il suffira d’indiquer que le cardinal de Richelieu avalait du crottin pour ses rhumatismes et que Mme de Sévigné préconisait pour le même mal l’essence d’urine. Elle affirmait en outre : « C’est aux vipères que je dois la pleine santé dont je jouis. » Le cloporte bouilli était souverain pour la gravelle. La fiente d’oie ou le ver de terre mangés à la cuillère guérissaient la jaunisse. Bien sûr, on purgeait déjà, encore que ce soit un siècle plus tard que ce remède atteindra son apogée.

Si l’on songe que Louis XIII fut saigné quarante-sept fois en une seule année, tandis qu’on lui administrait, dans ce même laps de temps, deux cent cinquante-neuf purgatifs, on conviendra avec Lenotre, qui nous donne ce détail, que le fils de Henri IV, réputé débile, était un colosse éclatant de santé puisqu’il résista quarante-deux ans à semblable régime…

A suivre...

Vos commentaires sont les bienvenus😃

Tag(s) : #Ephéméride, #Evénement historique
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