7 novembre :
Rethondes
Le 7 novembre 1918 à 21 heures, par un temps affreux (pluie et brouillard) un convoi de cinq voitures roulait à vive allure sur la route de la Capelle vers les avant-postes français. Sur la première voiture, un immense drapeau blanc claquait au vent, tandis que sur le marchepied un trompette debout sonnait le Cessez-le-feu. Un capitaine français (le capitaine Lhuillier du 171e R. I.) s’avança et fit un geste. Les cinq voitures s’arrêtèrent : les plénipotentiaires allemands venaient demander l’armistice.
Le capitaine monte en voiture, un clairon français prend la place du trompette et les voitures repartent vers la Capelle où les attendent le commandant de Bourbon-Busset et le commandant Ducornez. Le général de Winterfeld qui fut longtemps attaché militaire à Paris présente ses compagnons : le capitaine de vaisseau Vauschow, des officiers d’état-major, des experts et le président de la délégation, le ministre Erzberger, qui semble étranger à ce qui se passe. « On dirait un voyageur, a raconté Bourbon-Busset, à qui une courte panne d’automobile permet de se dégourdir les jambes pendant quelques instants. »
Lorsqu’ils remontent en voiture pour prendre le chemin de la gare de Tergnier, où le train les conduira à Compiègne, un poilu crie :
— Nach Paris !
Foch attendait au carrefour de Rethondes. Mais ici il faut donner la parole au seul survivant des acteurs de ces grands journées d’histoire : le général Weygand qui m’a conté la scène :
« Le maréchal Foch attend dans son wagon l’heure qu’il a fixée. Dans quelques instants, les représentants de l’ennemi seront là, attendant qu’il leur dicte les conditions des vainqueurs. Il tient enfin cette victoire pour laquelle il a travaillé pendant plus de quarante années de paix et dont il fut, dans une gigantesque lutte de huit mois, le grand artisan. Son cœur bat certainement plus vite que d’habitude. Mais pour qui le connaît, il est aussi maître de lui qu’il le fut aux moments les plus angoissants ou aux jours les plus glorieux de la bataille de France ; aussi plein de confiance et aussi dépourvu d’orgueil. »
Puis ce fut la fameuse scène dans le wagon de l’Armistice :
« Le texte de chaque clause, d’abord lu en français, est traduit en allemand par l’officier interprète Laperche. Les phrases bien articulées tombent dans un silence de mort. Les têtes sont droites, les visages impassibles, celui du général allemand très pâle est empreint d’une douloureuse expression.
À la lecture de l’article prescrivant l’occupation par les troupes alliées des pays rhénans et de têtes de ponts sur le fleuve, des larmes coulent des yeux du jeune capitaine. La scène atteint dans sa simplicité le plus haut degré de pathétique ; le moment est poignant… »
A suivre...
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